samedi 17 novembre 2012

1917, les révolutionnaires russes et la religion



Notre revue Socialisme International N° 9, éditée en 2004, proposait une série d'articles sur la religion, en vue de combattre l'islamophobie ambiante y compris à l'extrême gauche. Cet article de Claude Meunier sur "Les révolutionnaires et la religion" nous permettaient de répondre à ceux parmi les marxistes qui en étaient restés à une seule phrase de Marx sur "l'opium du peuple" (souvent sans même lire le reste du paragraphe duquel est tiré cette phrase célèbre). Nous pensons que l'attitude du parti bolchevique lors de la révolution russe était infiniment plus correcte.

Les révolutionnaires russes et la religion

Quelle fut l’attitude des révolutionnaires russes envers la religion après la prise du pouvoir par les Conseils ouvriers et paysans en 1917 ? Leur priorité fut la défense du nouvel État ouvrier, la reconstruction économique et la solidarité avec les travailleurs dans d’autres pays. Dans la pratique, la lutte idéologique contre la religion fut souvent reléguée au second plan. Mais à plus long terme, ils savaient que la question de la religion était cruciale. Construire une société socialiste ne se réduisait pas au développement des moyens de production. Il s’agissait surtout de créer une société plus juste, plus humaine. 

Avec l’avènement du socialisme, la religion devait disparaître d’elle-même.
Comment cette lutte devait-elle être menée ? Fallait-il apprendre le marxisme (avec sa Sainte Trinité de Marx, Engels et Lénine) aux masses ignorantes comme on apprend le catéchisme aux enfants en faisant répéter des dogmes ? Fallait-il toujours s’opposer frontalement à la religion, quelles que soient les circonstances ?

Pour Trotsky, les choses étaient claires : " Il est de nos jours parfaitement évident et incontestable que nous ne pouvons pas mener notre propagande anti-religieuse par la voie d’un combat direct contre Dieu./…/ La lutte contre une religion donnée, ou contre la religion en général et contre toutes les formes de mythologies et de superstitions, n’est ordinairement couronnée de succès que si l’idéologie religieuse entre en conflit avec les besoins d’une classe donnée dans un nouvel environnement social./…/ les méthodes formalistes de critique anti-religieuse, la satire, la caricature, etc. ne peuvent pas faire grand-chose. Et si l’on y va trop fort, on risque d’obtenir un résultat inverse./…/ En fermant simplement les églises, comme il a été fait en quelques endroits, ou par d’autres excès administratifs, non seulement vous serez incapables d’atteindre un succès décisif, mais au contraire, vous préparerez la voie pour un retour en force de la religion. "

La religion étant la traduction " [du] chaos de la nature et le chaos des rapports sociaux dans le langage d’images fantastiques ", il était évident pour les révolutionnaires russes de l’époque que " seule l’abolition du chaos terrestre peut supprimer à jamais son reflet religieux ". " Une direction consciente, raisonnable et planifiée de la vie sociale, dans tous ses aspects, abolira définitivement tout mysticisme et diablerie. " (1)

Sur le plan idéologique, la chose la plus importante, selon Lénine, fut d’éveiller chez les masses " une attitude intelligente envers les questions religieuses et une critique intelligente des religions ".

" Ce serait l’erreur la plus grande et la plus tragique pour un marxiste de penser que les millions de gens (en particulier les paysans et les artisans), qui ont été condamnés par toute la société moderne à vivre dans l’obscurité, dans l’ignorance et dans la superstition, peuvent s’en sortir seulement en suivant la ligne droite de l’éducation marxiste. On devrait fournir à ces millions de gens, à des fins de propagande, la littérature athée la plus variée ; on devrait les informer de faits venant des sphères les plus diverses de la vie ; ils devraient être abordés de toutes les façons imaginables, afin de les intéresser, de les éveiller de leur stupeur religieuse, de les remuer en se servant des approches et des méthodes les plus variées, et ainsi de suite. "

Il conseilla la traduction et la diffusion des écrits des philosophes athées du siècle des Lumières, qui seraient souvent " mille fois plus adaptés " que les textes marxistes "ennuyeux, secs et/../ presque entièrement dépourvus d’exemples concrets choisis avec soin qui prédominent dans notre littérature… ". (2)

Les marxistes n’ont donc aucune réticence à condamner les représentants de la religion organisée là où ceux-ci participent à l’oppression et à l’exploitation. Mais vis-à-vis de ceux qui sont sous leur influence nous devons faire preuve de beaucoup de patience et de pédagogie, car séparer la masse des fidèles d’une religion de la hiérarchie qui les trompe est par définition une tâche difficile et délicate. " Proclamer la guerre contre la religion comme un des objectifs politiques d’un parti ouvrier, disait Engels, n’est qu’une simple pose anarchiste ". (3)
Partout où des révolutionnaires marxistes authentiques ont été en position de prendre le pouvoir ils ont proclamé la liberté du culte, la séparation de l’Église et de l’État (ce qui garantit entre autres l’indépendance de l’Eglise) et l’égalité entre toutes les religions. En Russie avant la révolution de 1917, les Bolcheviks avaient défendu les droits démocratiques des minorités religieuses comme la communauté russe orthodoxe des Vieux Croyants.

Pour Lénine, " Chacun doit être parfaitement libre de professer n’importe quelle religion ou de n’en reconnaître aucune, c’est-à-dire d’être athée, comme le sont généralement les socialistes. Aucune différence de droits civiques motivée par des croyances religieuses ne doit être tolérée. " (4)

En 1905, dans une situation pré-révolutionnaire, Lénine pensait même qu’il fallait appuyer — tactiquement — la partie du clergé orthodoxe qui s’opposait à la politique ultra-réactionnaire de la droite : " Si misérable, si ignorant que fût le clergé orthodoxe russe, il s’est réveillé cependant au fracas de la chute de l’ancien régime, du régime médiéval en Russie. Le clergé lui-même soutient aujourd’hui la revendication de liberté, s’élève contre le bureaucratisme officiel et l’arbitraire administratif, le mouchardage policier imposé aux ' ministres de Dieu'. Nous autres socialistes, nous devons appuyer ce mouvement en poussant jusqu’au bout les revendications des représentants honnêtes et sincères du clergé, en les prenant au mot quand ils parlent de liberté, en exigeant qu’ils brisent résolument tout lien entre la religion et la police. " (5)

Lénine insista également qu’il n’avait aucune opposition de principe à ce que des travailleurs croyants et pratiquants adhèrent au Parti bolchevique, et il s’opposa formellement à l’idée d’inclure l’athéisme dans le programme du parti.
Une fois arrivés au pouvoir les Bolcheviks ont mis fin aux subventions accordées par l’État à l’Église orthodoxe. Ils ont accordé des droits civiques et l’accès à la fonction publique aux juifs.

Si par rapport à la majorité russe de confession orthodoxe les Bolcheviks adoptèrent une attitude prudente et gradualiste, dans les pays de la périphérie musulmane, les communistes avaient comme consigne (qui malheureusement ne fut pas toujours suivie) de respecter la religion et la culture de la population, et de freiner la colonisation économique et le chauvinisme grand-russe des immigrants.

En mai 1917 ils organisèrent un Congrès des Musulmans de la Russie à Moscou. Celui-ci se prononça pour les droits de la femme. Un Commissariat pour les affaires musulmanes fut créé qui avait parmi ses dirigeants des musulmans assez éloignés des conceptions philosophiques et politiques des communistes, mais qui avaient décidé de soutenir le nouvel État ouvrier qui promettait aux peuples de la Caucase et d’Asie centrale la liberté religieuse ainsi que la reconnaissance des langues et des cultures locales.
Dans une situation d’extrême pénurie et de guerre civile où la question de la survie du régime révolutionnaire basé sur les Conseils ouvriers et paysans fut primordiale, les Bolcheviks n’hésitaient pas à subventionner, dans la mesure du possible, dans les pays de la périphérie musulmane sous contrôle de la Russie, des écoles et des tribunaux islamiques, à côté des écoles publiques et tribunaux soviétiques. Des colons russes furent évincés de leurs positions y compris dans le Parti bolchevique et les institutions de l’État ouvrier et remplacés par des représentants de la majorité musulmane.

Cette politique d’action affirmative permit à l’Armée rouge de recruter des milliers de musulmans, voire des groupes de partisans islamistes, qui luttèrent efficacement contre les armées contre-révolutionnaires.

Les communistes acceptaient des musulmans de gauche comme membres à part entière du parti. Selon Trotsky, 15 pour cent ou plus des membres du parti en 1923 dans les régions musulmanes étaient des croyants. En Asie centrale, alors que beaucoup de nouveaux militants étaient des musulmans, les Russes d’origine orthodoxe ne pouvaient adhérer au parti que s’ils étaient " libérés de tout préjugé religieux ". (6)

Le nouveau régime créa l’organisation Zhendotel (Département des femmes ouvrières et paysannes) pour travailler parmi les femmes musulmanes. À ses débuts, Zhendotel eut une approche pleine de patience et de sensibilité envers les délicats problèmes auxquels il était confronté. Les membres féminins de l’organisation portaient même le paranja (un voile islamique couvrant complètement la tête et le visage) au cours de discussions tenues avec des femmes musulmanes. (7)

Plus tard, cependant, et sous l’influence de Staline, cette approche fut abandonnée et un combat fut organisé contre les " déviations nationalistes " au nom… du féminisme. Cette campagne fut même lancée le 8 mars 1927, lors de la journée internationale des femmes. Des femmes voilées furent agressées, ce qui ne manqua pas de provoquer une réaction sanglante de la part du clergé musulman. Des milliers d’enfants furent retirés des écoles soviétiques et des femmes non-voilées furent à leur tour agressées.

Cette attitude chauvine et bureaucratique de la part de Staline et de ses partisans (une attitude qui fut rondement dénoncée par Lénine peu de temps avant sa mort) conduisit non seulement à la suppression de la liberté religieuse mais ne fut qu’un avant-goût d’une réaction plus générale.

En Russie avant la contre-révolution stalinienne, le christianisme pas plus que le judaïsme et l’islam en tant que religions ne furent pas interdits, pour la bonne et simple raison que l’interdiction de la religion n’a jamais fait partie du programme marxiste.

La position de Lénine sur cette question était claire et sans ambiguïté. " Nous réclamons la séparation complète de l’Église et de l’État afin de combattre le brouillard de la religion avec des armes purement et exclusivement idéologiques : notre presse, notre propagande. " (7)

Et il s’appuya sur Engels, qui, " tout en condamnant impitoyablement la moindre concession/…/ à l’idéalisme et à la religion, condamne non moins résolument [la] notion pseudo-révolutionnaire que la religion serait interdite dans une société socialiste ". (8)
Claude Meunier (LCR Saint-Denis)

NOTES
(1) L. Trotsky, 'Sens et méthodes de la propagande anti-religieuse' (1925)
(2) V.I. Lenin, 'On the Significance of Militant Materialism'(1922). Traduction libre.
 
(3) V.I. Lenin, 'On Religion', p. 12 (New York, 1935). Cité dans Paul N. Siegel, 'The Meek and the Militant' (1982).
 
(4) Lénine, 'Socialisme et religion' (1905).
 
(5) Lénine, 'Socialisme et religion' (1905).
 
(6) Lire David Crouch, 'Bolsheviks and Islam : Religious Rights', Socialist Review (Londres), décembre 2003 sur le site http://www.socialistreview.org.uk
 
(7) Voir Revue Internationale n° 109 sur le site http://www.internationalism.org/french
 
(8) Lénine, 'Socialisme et religion' (1905).
 
(9) Seul le régime ultra-stalinien d’Enver Hohxa en Albanie adopta l’athéisme comme dogme officiel de l’Etat. Non seulement ce régime ne fut pas le produit d’une véritable révolution prolétarienne (condition minimum selon la tradition marxiste pour qu’un pays soient considéré comme un Etat ouvrier), mais il exerça le pouvoir dans un des pays les plus pauvres et les plus isolés de l’Europe. Ses dirigeants furent des nationalistes formés au 'marxisme' à l’école de Staline et de Mao, et le culte de la personnalité autour du chef suprême ressemblait à rien d’autre qu’une nouvelle religion, comme ce fut d’ailleurs le cas en Russie et en Chine.
 


mercredi 14 novembre 2012

Dossier Islam et révolution

Dans le numéro 9 de la revue Socialisme International ("nouvelle série"), en 2004, nous avons rédigé un long dossier sur l'Islam, afin d'aider à construire la résistance contre l'islamophobie, dont l'essentiel de la Gauche se désintéressait. Ces articles sont encore utiles aujourd'hui, alors nous allons commencer ce blog d'archives de Socialisme International en rendant disponibles les articles de ce dossier.

Voici une présentation d'un livre important de Gilles Kepel

Les livres sont des armes
Comprendre la revendication islamique en Occident
À l’Ouest d’Allah 
 

À l’Ouest d’Allah, de Gilles Kepel 
Édition du Seuil, 1994
 
(377 pages)

Dans le contexte persistant de stigmatisation de l’islam en France, cette étude de Gilles Kepel (publiée en 1994) redevient nécessaire pour comprendre la revendication identitaire islamique dans trois pays occidentaux (USA, Royaume-Uni et France).

L’auteur analyse les circonstances dans lesquelles s’est développée cette revendication : les circonstances historiques spécifiques de l’apparition de l’islam dans ces pays, la place des populations islamisées dans la société. Il entrevoit ce que cela révèle du point de vue de ces populations et du point de vue de ces sociétés dans leur ensemble.

Trois formes du « déni de citoyenneté »
Aux USA, la population musulmane est noire et se revendique de la Nation de l’islam. Celle-ci est née pendant la Grande Dépression des années trente à une époque où de nombreuses sectes et Églises noires proliféraient. Ce mouvement a su utiliser les dogmes religieux musulmans existants en les adaptant à une population christianisée ou habituée au discours chrétien, pour créer un courant religieux inédit, mais se réclamant (et de plus en plus proche) de l’islam, et particulièrement pertinent pour le public visé. Par exemple, les premières années, le Ramadan n’avait pas lieu le neuvième mois de l’année du calendrier musulman mais systématiquement en décembre, car les nouveaux convertis avaient l’habitude de célébrer Noël et de faire la fête à cette période. En effet, ces nouveaux convertis furent à l’origine la population d’anciens esclaves arrivés dans les États du Nord et subissant la crise économique et sociale jusqu’à atteindre des niveaux de vie inférieurs à ceux qu’ils avaient connus dans les plantations du Sud. C’est cette population vivant dans des ghettos et donc exclue socialement et économiquement, n’ayant pas de reconnaissance politique, qui forme la base sociale de la Nation de l’islam.

Au Royaume-Uni, la population musulmane est issue de l’émigration de l’ancienne colonie indienne. Elle a donc une tradition islamique en arrivant en Occident, contrairement aux musulmans américains, et ses dogmes sont plus proches du modèle traditionnel islamique. Sa structure est fortement influencée par celle existant en Inde avant l’émigration. Gilles Kepel opère donc un retour sur les deux lignes directrices qui avaient organisé les musulmans dans l’ancien empire : « l’hégire intérieure » (pour Gilles Kepel : dans un État où l’islam n’est pas la religion dominante les musulmans au lieu de quitter cette terre comme le voudrait la doctrine se replient sur « la citadelle de leur foi et de leurs croyances ») et « le communautarisme politique » (les représentants de la population musulmane veulent jouer un rôle politique, et la religion devient un prétexte politique plus qu’un « guide de la vie dans tous les domaines »). Les institutions britanniques, qui avaient favorisé les divisions et le communautarisme religieux en Inde, maintiennent leur stratégie quand les musulmans s’installent sur son territoire après la Seconde Guerre Mondiale. Si la ségrégation religieuse et raciale sur un plan juridique est beaucoup moins forte qu’aux USA, l’arme de la division de la société en communautés religieuses permet de soumettre plus facilement les travailleurs, et donc de fragiliser les nouveaux Anglais musulmans.

En France, l’islam apparaît réellement avec la vague d’immigration maghrébine dans les années soixante. La République donne l’égalité juridique aux Français, mais ne donne la nationalité qu’après une sorte de période de probation où les immigrants sont censés perdre de leur culture d’origine pour s’intégrer, c’est-à-dire remplacer leur culture d’origine par la « culture française » (la culture de la classe dominante). La revendication identitaire islamique naît chez les jeunes de la deuxième génération, à la fin des années quatre-vingt, chez ceux pour qui cette « culture française » est associée à l’impasse de leur situation sociale en France. Il s’agit de jeunes vivant dans des banlieues déshéritées et dont l’avenir économique est très sombre, du fait du chômage de masse. Enfin, cette revendication naît alors que la population musulmane est de plus en plus stigmatisée par les discours (et les actes) politiques.

À ces trois formes du « déni de citoyenneté », la revendication identitaire islamique prend des formes différentes, très liées à la société où elle est implantée et à son histoire dans celle-ci. Plus la ségrégation des musulmans est forte, plus la revendication de leurs représentants est radicale. Aux USA, la Nation de l’islam veut un État Noir indépendant de l’État Blanc et tout ce qui provient des Blancs et de leur culture est diabolisé. En Angleterre, les différents représentants de la communauté musulmane (les différences viennent des courants de l’islam ou des États musulmans dont ils sont le relais) ont cherché à s’imposer auprès des pouvoirs publics pour acquérir des privilèges politiques. Ils ne remettent pas en cause l’État où ils vivent puisqu’ils font partie du système et que celui-ci a réussi à les intéresser à son maintien. En France, la revendication identitaire islamique, âgée de cinq ans environ quand le livre est paru, reflète surtout le contrepoint d’une diabolisation des Arabes et des musulmans dans le discours dominant. Elle n’est pas réellement encore structurée (même si les différents États musulmans tentent chacun d’augmenter leur influence) et son ambition politique est balbutiante : il s’agit surtout de surmonter les obstacles qui empêchent les musulmans de pratiquer librement leur religion – à égalité avec les autres religions- dans un pays où celle-ci n’est pas interdite mais fortement attaquée.

Au-delà des particularismes de chaque pays abordé, l’étude de Gilles Kepel permet d’appréhender un trait commun significatif : les associations ou organisations musulmanes jouent dans les trois cas un double rôle d’orientation morale (voire politique) et d’aide concrète à la population (sortir de l’emprise des gangs, des hyper-ghettos, apporter des soins, de la nourriture, du soutien scolaire…). C’est ainsi qu’elles réussissent à paraître une alternative solide au modèle occidental qui exclut ces « nouveaux musulmans ».

Les révolutionnaires combattent avec eux ce modèle, mais leurs réponses sont bien sûr différentes. Leur argumentation doit pourtant prendre en compte les raisons actuelles et historiques particulières qui les ont conduits à appeler l’islam à la rescousse de leur mal-être.
Romain C.